Les objets constituant l’environnement domestique étaient au nombre de 112 au début de l’expérimentation, la soustraction de 2/3 de matière s’est appliquée à 14 d’entre eux par semaine. L’expérimentation s’est concentrée sur les éléments qui constituent l’habitat de la designer, elle ne s’appliquait ni aux consommables (savon, dentifrice, nourriture …) ni aux objets nomades (sortant de l’appartement comme un téléphone ou des habits).

Chaque objet a été suivi et documenté tout au long du projet expérimental, depuis son achat en passant par sa transformation et jusqu’à son dernier usage au sein de l’appartement.

Table AD-1, début du projet expérimental, octobre 2020.
Table AD-1 démontée, fiche de pesée des différents éléments.
Table AD-1, fiche de transformation.
Table AD-1, fin du projet expérimental, février 2021.

Maison Soustraire, lettre #8, le 7.12.2020 :

Je suis adossée au radiateur du salon, assise sur un reste de canapé qui forme un coussin  large, les jambes étendues sur le tapis, l’ordinateur est posé sur mes cuisses. Je n’éprouve aucune gêne à écrire depuis ici, dans cette position. Je profite aussi du dernier verre de vin qui va devoir disparaître, mes tentatives sur les deux précédents m’ont appris qu’il n’y avait pas d’espoir de sauver de fonction pour cet objet.
 
Les adaptations que mon corps va devoir réaliser, pour la plupart, je les devine en transformant les objets. Si je choisis par exemple qu’une assise soit basse plutôt que fragile, je sais que ce choix va obliger mes muscles à mobiliser plus d’énergie pour me relever. Je me range derrière ce choix, parce que je sais mon corps capable de réaliser cette action sans difficulté. 
 
Dans la chambre-salon tout est maintenant proche du sol. Le matelas étroit est separé du parquet par une épaisseur de latte, du canapé il reste deux coussins superposés qui frôlent les vingt centimètres de haut, il y a le coussin sur lequel je suis assise, une table basse (très basse), une fraction de tapis.
 
Dans la cuisine, la table a été démontée et pesée aujourd’hui pour être repensée avec un tiers de sa masse. Le choix : hauteur ou surface? Sachant que je vais pouvoir produire au moins deux ou trois assises d’une taille standard ; je choisi de conserver la hauteur, pour que l’on puisse continuer à s’asseoir autour d’une table, à 2 ou 3, ici. 
La hauteur de l’assise n’empêche pas ça pourtant… nous pourrions être 2 ou 3, assis par terre autour d’une table basse ici.
 
Le choix de hauteur, me permet, entre autres, de penser qu’il est plus aisé d’accueillir une personne qui a du mal à se baisser ou se relever et que cet habitat propose ainsi une forme d’accueil.
Pourtant le choix de surface et donc d’une hauteur moindre, occasionnerait des contacts et des gestes de ma personne et/ou des personnes présentes, qui permettraient aussi à l’individu qui a du mal à se baisser ou à se relever de le faire sans peine.
Alors c’est possible qu’un objet nous désapprenne un geste ou un contact, et que cette expérience Maison Soustraire qui consiste à mettre à nu et à analyser des objets, permette de reconsidérer des gestes et des contacts.
Il faut peut-être mettre en ruine le standard pour retrouver du spécifique.

Les 112 objets au début de l'expérimentation, octobre 2020 :